L'autre Rimbaud, Roman

David Le Bailly

L'Iconoclaste

  • Conseillé par (Libraire)
    6 décembre 2020

    Frédéric, l'oublié des Rimbaud

    Nous connaissons tous Arthur, mais qu'en est-il de Frédéric ? Inconnu au bataillon me direz-vous ... Et vous avez raison. Relégué au second plan, humilié, trahi, puis effacé, voilà le sort qu'à subi l’aîné des Rimbaud. David le Bailly retrace l'histoire de cet anti-héros avec beaucoup de bienveillance et nous offre, par la même occasion, un éclairage nouveau sur la vie du célèbre Arthur Rimbaud. Entre mère tyrannique, et rêve d'élévation sociale, cette intéressante biographie se lit comme un roman.


  • Conseillé par
    24 juin 2021

    famille

    Je ne m’intéresse généralement pas à la vie des auteurs, à leurs problèmes familiaux. Pourtant, cet autre Rimbaud m’intriguait.

    J’ai aimé découvrir ce frère, Frédéric, complice d’Arthur dans leur jeune âge (ils n’avaient qu’un an de différence).

    Puis la fuite d’Arthur les a séparé. Frédéric est resté dans leur ville natale. Il tentera lui aussi d’échapper à la mère qui ne veut pas qu’il se marie.

    J’ai eu à la fois de la peine pour Frédéric qui repense avec nostalgie à sa complicité avec son petit frère, et contente de sa vie minuscule, lui qui a eu un métier et des enfants.

    Leur soeur Isabelle m’a horripilée et fait rire, elle qui veut écrire la légende de son frère n’hésite pas à travestir la vérité.

    J’ai aimé qu’en aparté, à chaque fin de partie, l’auteur explique les difficultés qu’il a rencontré à chercher des traces de ce frère que la mémoire familiale s’est escrimé à faire disparaitre.

    Quant à la mère, c’est une vrai repoussoir.


  • Conseillé par (Libraire)
    22 septembre 2020

    Qui ne connait pas Rimbaud et son célèbre Dormeur du val?
    Certains savent la relation tendue qu'il entretient avec sa mère et celle, passionnée mais destructrice, avec Verlaine. Cependant personne ne lui conçoit de frère, et pourtant...

    David le Bailly nous offre un faramineux travail de recherche, entremêlé de courts chapitres sous forme de compte-rendu sur l'avancée et sa motivation quant à extirper ce frère de l'oubli.

    Il procède grâce à cette enquête familiale à la réhabilitation de Frédéric Rimbaud.
    L'idiot, le raté, le mal aimé, l'évincé, le renié, ainé de tout juste un an d'Arthur qui vécu envers et contre cette famille qui fit tout pour l'effacer.

    Jessy


  • Conseillé par (Libraire)
    21 août 2020

    Au-delà de la légende

    Sur la photo, un adolescent regarde l’objectif, la raie sur le côté. Il porte un brassard de communiant. A côté, une silhouette évidée, comme découpée par une paire de ciseaux, ces ciseaux que les censeurs soviétiques utilisaient pour leur réécriture de l’histoire. La silhouette a été gommée, supprimée par les ciseaux d’Isabelle Rimbaud, qui n’a laissé que son frère Arthur sur le document abondamment publié. La silhouette alors? C’est celle de Frédéric, le frère ainé, enseveli dans la mémoire collective. Peu de biographes du poète se sont attachés à lui, le balayant rapidement d’un adjectif méprisant: « raté ». Journaliste, David le Bailly, aime écrire sur les anonymes, sur les « vies minuscules », aussi fut il tenté de passer au révélateur des mots, cette photo, pour faire apparaître le visage et le corps cachés de cet autre adolescent. Lui redonner une vie, la vie qu’il a connue.

    L’écrivain débute sa minutieuse enquête, dans ces Ardennes qu’il nous décrit avec précision, comme un roman, y mêlant ses réflexions personnelles lors de passionnants intermèdes. C’est à Roche, que tout se passe, se trame, se vit. C’est là, qu’une femme, Vitalie Cuif, va engendrer un génie et détruire deux jeunes hommes. En essayant de faire revivre Frédéric, c’est la famille Rimbaud qui apparait sous la plume de l’auteur, celle d’un père rapidement absent et d’une mère auprès de laquelle, la future Folcoche d’Hervé Bazin semble bien fade. C’est elle qui écrit l’histoire, qui dirige, ordonne avec comme seules valeurs, l’argent, la terre, la foi et le respect social. « On leur avait inculqué la rigueur, la discipline. Mais de gestes de tendresse, de caresses, de baisers, ils n’avaient rien reçu, rien vu ». Alors les deux frères, s’unissent se protègent dans un amour presque fusionnel qu’ils découvrent ensemble « à la manière de pauvres aveugles: tâtonnant, main tendue comme des mendiants, sans cesse se cognant ». Mais en grandissant Arthur devient différent, quitte les Ardennes, maltraite les mots, la syntaxe, aligne en quelques mois sur des feuillets disparates, des vers qui vont faire trembler le monde. De solidaire, la fratrie va se disperser à jamais avec cependant, un seul dénominateur commun: l’éloignement de la mère. Arthur le fera en parcourant des milliers de kilomètres de Chypre à Aden, de manière hypocrite, intéressé par l’argent. Frédéric, lui, restera à proximité, à Attigny, à quelques encablures de Roche et prendra la foudre sur place.

    D’Arthur qui va devenir un mythe mondial, on ne peut évidemment dire qu’il est un raté mais si l’on met côte à côte comme le fait David Le Bailly, la vie quotidienne des deux frères, on se dit que la vie des deux garçons est aussi médiocre l’une que l’autre. En creux, et en citant des lettres d’Arthur à sa mère, le génial poète apparait aussi comme un petit comptable, alignant non plus ces mots magiques mais des colonnes de chiffres. Ce changement d’angle de prise de vue modifie considérablement la perspective tant de fois lue de la mythologie rimbaldienne. On se dit alors que le plus rebelle des deux frères n’est peut être pas celui que l’on croit.

    Cette lente décadence familiale sera poursuivie par Isabelle, la soeur, qui achèvera jusqu’à l’horreur « l’oeuvre » de sa mère. Avec rigueur mais aussi beaucoup d’empathie, cette empathie si absente dans la ferme ardennaise, l'auteur fait surgir de terre, un homme ni plus sot, ni plus méchant que le commun des mortels, un conducteur de calèche, qui ne put se construire à l’ombre d’un frère glorifié et vanté jusqu’à l’extrême par Isabelle et son mari qui s’approprièrent les droits mais aussi la vie réécrite d’un frère sanctifié. Pour construire la légende, il fallait effacer l’ainé qui faisait tache et gâchait la photo mythique. Cette destruction, minutieusement décrite, se concrétise lentement au fil des chapitres dont l’intitulé progressif dit toute l’abomination: « frère », puis « suspect », « dénigré », « déchu », « traître », « renié », « dépossédé », et « effacé » pour finir.

    Livre conseillé par Lou et Eric